17 octobre 2007

interview de Tiken Jah Fakoly

tiken jah fakoly Nous avons rencontré Tiken Jah Fakoly un mois avant la sortie de son nouvel album "l’africain" , dans las montagnes de L’Ardèche pour un superbe festival "Africabidon" dont c'était la première édition et qui a invité l’Afrique pour 3 semaines dans le village de Bidon.

L’initiative de ce festival militant revient à Maurice Freund qui a lancé la construction d’un village Africain sur la plaine d’Aurèle.

Et Africabidon acceuillait Tiken jah fakoly au stade municipal de Saint marcel d’Ardèche.
Tiken Jah Fakoly "plus jamais ça" :

Nous nous rendons à quelques 10 km de là pour rejoindre Tiken jah et son groupe à l’hotel.

RaC : Bonjour Tiken,

Tiken : Bonjour

RaC : Comment as-tu démarré dans la musique reggae ?

Tiken : j’ai concrètement démarré en 89. En 87 mon père est décédé, en 88 la famille n’a pas eu les moyens d’acheter mes fournitures scolaires, c’était dur, ils voulaient que je fasse un peu de commerce.
J’avais été renvoyé de l’école, je n’étais pas fort à l’école ; il fallait payer une école privée ou me laisser faire, donc mon grand frère a mis les moyens nécessaires à ma disposition pour que je fasse un peu de commerce, donc j’ai été commerçant pendant un an et je me suis arrangé pour qu’on me laisse tranquille et j’ai commencé à organiser des petits concerts dans la ville où j’étais, c’était en 89.
On a d’abord formé un groupe, on a répété pendant deux ans entre 89 et 91 et en 91 on a fait notre premier concert qui s’est bien passé, ensuite, on en a fait d’autres jusqu’en 93. On a été découvert par un producteur qui nous a fait rentrer en studio donc l’album est sorti et c’est comme ça que c’est parti ;
puis j’ai rencontré un couple français qui m’a fait rentrer en studio en 96 et puis on a sorti le troisième album parce que les deux autres c’était plutôt de l’auto distribution mais c’est en 97 que j’ai vraiment sorti l’album mangercratie ….
Mais il faut que je souligne que les débuts ont été difficiles, avec la famille ça a été une bataille pas possible, enfant d’une famille de musulmans où la musique était vue comme une activité anti-Islam, donc il a fallu me battre, il a fallu traverser les moments difficiles dont je vous épargne les détails mais au niveau de la famille j’étais considéré comme l’échec, le gosse qui avait fait l’échec mais moi j’étais confiant et je continue quoi.

tiken jah fakoly concert afrikabidonRaC : Et maintenant ta maman, comment prend-elle ton avenir ?

Ma maman est très fière, c’est la seule qui m’ait toujours soutenu. Elle était danseuse, vous savez les danseuses africaines qui dansent les seins nus, elle n’était pas surprise que parmi ses enfants il y ait quelqu’un qui s’intéresse à la musique donc du coup elle est la seule qui m’ait soutenu au départ.

Tiken Jah Fakoly "djourou" :

RaC : Même dans le reggae ?

Oui, elle m’a juste dit de ne pas boire d’alcool et de ne pas fumer de ganja, bon j’ai grandi j’ai dépassé les dix-huit ans et je n’ai pas tout respecté mais j’ai fait l’effort de m’éloigner de certains trucs.

tiken jah fakoly concert afrikabidonRaC : Quel est ton point de vue sur le rapatriement des noirs en Afrique ?

Je pense que c’est important mais ce n’est pas forcement la peine, c’est important mais pas forcément la peine parce les noirs qui sont aujourd’hui partout dans le monde représentent l’Afrique, la race noire ; quand on voit aujourd’hui de grands boxeurs comme Mike Tison ou de grands artistes comme Michael Jackson.

Quand on voit aujourd’hui tous ces gens, ils représentent dignement le continent même avec d’autres nationalités mais ce sont des africains, donc moi je pense pas que le rapatriement soit une bonne chose mais je crois à une chose, c’est de faire comprendre à ces noirs qu’ils ne sont pas américains, ils sont africains.

Aux Antilles, ils ne sont pas autre chose, ils sont africains, ils sont libres d’aller où ils veulent mais ça serait bien qu’ils viennent investir sur ce continent, qu’ils se rapprochent.

Le rapatriement aurait pu être fait quand il y avait l’esclavage aux Etats-Unis, aujourd’hui ils sont libres, là ils n’étaient pas libres donc il fallait les ramener en Afrique.

Il y a beaucoup de combats à mener pour qu’ils soient libres, beaucoup a été fait, il y a des gens qui se sont sacrifiés pour ça comme Martin Luther King et donc aujourd’hui le plus important pour moi dans mon message est de faire savoir à tous ces africains qui ont été déportés du continent Africain au reste du monde qu’ils sont africains, ils ne sont pas obligés de revenir mais le plus important c’est qu’on se rapproche et qu’on se soutienne pour représenter le black power, la puissance.

Tiken Jha Fakoly " Soundiata ":
En Occident on a pas dit la vérité aux jeunes, moi si je vous dis que je ne connais pas Napoléon , vous allez me dire que je suis un inculte, que je ne connais pas le roi Louis XIV, on va dire que je ne lis pas, que je ne suis pas instruit mais si je vous demande à vous si vous connaissez Soundiata Keita, Soumangourou Kanté , Samory Touré, vous allez me dire non mais on ne va pas dire que vous êtes un inculte, parce que pour les dirigeants occidentaux, ça ne faisait pas franchement partie de la pluralité alors que pour nous c’est très important.

tiken jah fakoly concert live 2007
K : Dans tes morceaux, tu parles souvent de la politique, d’où te vient ta conscience politique ?

Je pense que ma conscience politique est venue par rapport à tout ce que j’ai vu autour de moi, tout ce que j’ai lu dans les journaux, tout ce que j’ai vu à la télé, dans mon pays, les périodes difficiles qu’il a traversé et qu’il continue de traverser ; c’est ce qui m’a réveillé, il y a des choses à faire, il y a des choses à dire, j’ai envie d’être parmi les personnes qui vont dire les choses , les personnes qui vont essayer de changer les mentalités.

Parce que je trouve que le peuple est mené en bateau vers des destinations inconnues, je trouve qu’on utilise le peuple pour rester au pouvoir, parce que en Afrique, je trouve que les gens deviennent présidents parce qu’il y a un groupe de copains qui a décidé de se mettre ensemble pour diriger mais ils n’ont pas de programmes.

La conscience politique est venue avec toutes les souffrances que je vois autour de moi, avec les manipulations politiques que j’ai vu, que j’ai compris, donc je me suis dit que c’était important de conseiller un peu le peuple par rapport à ça

RaC : Voici une dernière question concernant ta production fakoly production et Beta Simonn que tu viens de sortir, peux tu nous présenter un peu cet artiste ?

Beta Simon est un artiste qui a été très populaire en Côte d’Ivoire, c’est un artiste qui a été célèbre avant moi. Quand j’ai sorti mon album qui m’a fait connaître, Beta Simon était déjà connu par tut le monde.

Il était connu et j’ai même passé une journée derrière en train de me promener dans les rues d’Abidjan, je dirais que c’est carrément un artiste auquel j’ai demandé un autographe, et puis je l’ai retrouvé quelques années après en France et j’ai trouvé que c’était pas normal qu’il soit presque prêt à abandonner la musique puisque la promotion de la carrière d’un artiste en France est très difficile, donc quand j’ai rencontré Beta Simon et qu’il était presque prêt à arrêter, je lui ai dit «"on va essayer de travailler ensemble", on a réussi un album qui vient de sortir en France et qui se débrouille pas mal car on a bientôt trois mille albums vendus en deux mois et donc comme on a pas assez de « promo » derrière c’est déjà pas mal ;

c’est un artiste qui a un talent fou, qui fait parti de cette diversité, quand tu écoutes Beta Simon ça n’a rien à voir avec Tiken Jah Kakoly, ça n’a rien à voir avec Alpha Blondy et donc ça fait partie de cette multitude d’artistes africains qui n’ont pas eu la chance d’être connus ici. Fakoly production a été crée pour ça, pour donner un coup de main à tous ces artistes qui méritent d’être connus ici et qui ne le sont pas encore.

tiken jah fakoly

RaC : Merci de ta patience, c’est assez rare pur un artiste de ton niveau…

Tiken : On fait surtout du reggae, il n’est pas question d’avoir une barrière entre ceux qui font passer notre message à un autre niveau.

Tiken Jah Fakoly " Tara ":

Photos Yogi/RaC : .

Aucun commentaire:

Rechercher dans Roots and Culture

Education is the key